Autobiographie d’Emmanuel Lévyne, extraite de « la kabbale du aleph » (p 71 à 73) Ed. Tsédek 1981

Emmanuel Lévyne est né en 1928 à Paris, de parents français, dont les familles étaient originaires de Russie et de Pologne. Certains de ses ancêtres ont été des rabbis hassidiques connus pour l’importance qu’ils attachaient à la TSEDAKA l’acte de charité et de justice envers les pauvres. Ainsi l’un d’eux refusait de se mettre à table tant qu’il n’était pas assuré que tous les miséreux de son village avaient de quoi manger.

Sa mère a passé toute son adolescence à Jérusalem, pour veiller sur son grand-père qui s’y était rendu afin de mourir en Terre Sainte, selon la coutume traditionnelle, car, d’après la Kabbale, les Juifs qui y sont enterrés ressusciteront les premiers à la venue du Messie. Elle s’occupait en même temps des pauvres de la ville et les soignait, et les rabbins kabbalistes l’appelaient « nesiate hatsedaka », la princesse de la charité.

Son père, brillant journaliste juif, plus connu sous le pseudonyme de Meyerkey, a été un pionnier du rapprochement entre Juifs et chrétiens. Dans une conférence organisée en février 1927 par l’Union de la Jeunesse Juive Universelle et son organe « Chalom », dont il était le rédacteur en chef, et consacrée à l’œuvre du célèbre rabbin kabbaliste Elie Bénamozegh, auteur de l’ouvrage, « Israël et l’Humanité », il fit cette déclaration : « Devant les représentants du christianisme, permettez moi de dire avec quel cœur je souhaite qu’enfin nous finissions par nous connaitre, que nous nous aimions les uns les autres, que dans la fidélité à notre foi respective toujours épurée à la source d’où elle émane, nous travaillions à l’avènement du règne de Dieu, que toutes les persécutions contre nos coreligionnaires cessent, que la haine fasse place à l’Amour. Et alors la religion ne sera plus un mot vide de sens, mais une réalité. »

C’est d’ailleurs dans l’accomplissement d’un acte de charité et d’amitié judéo-chrétienne qu’il fut victime du nazisme. En effet, il fut arrêté par les Allemands en février 1944, alors conduisait un ami devenu aveugle et ancien secrétaire du Consistoire Israélite, à une cérémonie à Notre-Dame, organisée par le régiment de son fils, mort pour la France en 1940. Il n’est pas revenu de la déportation.

Dans son enfance, Emmanuel Lévyne a fréquenté les écoles juives Gustave de Rothschild, Lucien de Hirsch, Maimonide et il a été enfant de chœur à la synagogue de la rue Buffault.

A la fin de l’occupation allemande et à la Libération, après avoir travaillé en usine comme décolleteur, il fait des études technologiques à l’école O.R.T. et au Conservatoire des Arts et Métiers et entre au Laboratoire de Joliot-Curie au Collège de France.

Puis il entreprend des études rabbiniques et, sous l’impulsion d’Emmanuel Rais , alors un des plus proches disciples du grand kabbaliste juif Jacob Gordin, il approfondit la mystique juive et se passionne pour la littérature et la pensée religieuse russes.

Depuis 30 ans, Emmanuel Lévyne n ‘a pas cessé ses recherches et son enseignement. Parmi ses nombreux élèves, citons A.D. Grad et Annick de Souzenelle, auxquels il a appris à lire l’hébreu et les premiers éléments de la Kabbale. D’autres sont devenus rabbins et sont même entrés dans des Yechivoth (écoles talmudiques supérieures). Il a collaboré avec le Dr Paul Azoulay, savant étymologiste, et a travaillé avec Carlo Suarès à l’élaboration de son commentaire de la Genèse, qu’il a été le premier à publier dans sa revue « Tsédek » et dont il s’est inspiré en partie dans sa « Kabbale de la Création » tout en se référant principalement à la tradition kabbalistique rabbinique, au renouvellement de laquelle il veut contribuer de l’intérieur, dans son propre cadre.

Compléments

Emmanuel Lévyne dans l’immédiat après guerre a fait partie d’un groupe de jeunes juifs survivants. Contacté là par l’organisation sioniste il a participé à l’aventure de l’Exodus en 1947. Mais il s’est rendu compte de la manipulation de celle-ci en vue apitoyer l’opinion publique international pour qu’elle accepte la création de l’Etat israélien. En proie à une crise nerveuse, il débarquera à Sète. Cela constituera sa rupture avec le sionisme politique . Il racontera celle-ci dans son livre “Judaïsme contre sionisme” (pages 197 et 198 de la nouvelle édition).

Une autre rupture avec le sionisme sera la publication d’un courrier des lecteurs dans Le Monde du 31 mai 1967 où il explique que “la religion juive n’a rien à voir avec l’Etat [israélien]” et que “les rabbins ont combattu dans leur grande majorité, le sionisme à ses débuts et ont annoncé qu’il aboutirait à un désastre”. Cf “Judaïsme contre sionisme” nouvelle édition (pages 307 à 309).

Il décèdera à Morlaix en juillet 1989